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Quelques épisodes du premier bouquin

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Tuesday, September 12, 2006

Depuis quelle date je ne remplis plus mon devoir électoral

Depuis quelle date je ne remplis plus mon devoir électoral



A Moutonland, l'année 1995 vit l'arrivée au pouvoir de Jack Chorak (aussi appelé J.C.), élu grâce à ses promesses et à sa pâle imitation du Général De Baule. Elu aussi et surtout parce que les Moutonlandais voulaient du changement, convaincus que le mot changement devait automatiquement signifier amélioration, et las de supporter depuis aussi longtemps l'apparente passivité du pouvoir socialiste. Ils voulaient du changement les Moutonlandais, et bien ils en ont eu, mais peut-être pas comme ils l'avaient souhaité.

En effet, ce cher J.C., fraîchement élu ne perd pas une seconde et se met immédiatement au travail. Il nomme à la tête du gouvernement un M. Alain Duppé, presque inconnu du commun des mortels, avec un faux air inoffensif... Celui-là, à peine intronisé, se met sans attendre à l'ouvrage, il lance le mot d'ordre : la réforme. Les Moutonlandais, qui, si on en croit les suffrages obtenus par la droite, n'attendaient que cela, qu'on réforme ce pays, qu'on change de politique. Ces espoirs et ces attentes, bien légitimes représentaient dans la tête de beaucoup d'électeurs, la fin d'un calvaire, la fin d'une époque pendant laquelle le chômage avait considérablement augmenté et les conditions de vie s'étaient dégradées.

Les Moutonlandais, tout du moins la majorité, en glissant leur bulletin de vote dans l'urne s'imaginaient déjà cette réforme salvatrice qui allait endiguer et résorber le chômage, ils voyaient déjà leur salaire augmenter, ils pensaient déjà à la baisse de leur temps de travail, les fonctionnaires pensaient déjà à la paisible retraite qui, au bout de 37 ans et demi de travail, allait venir récompenser leurs bons et loyaux services, leur dévotion infaillible et fidèle.

Mais les Moutonlandais, et cette fois-ci tous, ne tardèrent pas à s'apercevoir dans les mois qui suivirent l'élection présidentielle qu'ils avaient installé au pouvoir le premier monarque élu démocratiquement. Une personne très intelligente certes, mais sans scrupules et qui avait pris place au 1er rang de la nation en abusant de la crédulité et de la naïveté de pauvres gens essoufflés par vingt-cinq ans de crise économique. Mais qui n’aurait pas fait la même chose à sa place ?

Et ça commence en été : le 1er août, la TVA prend deux « points » supplémentaires pour passer à 20,6 %, ce qui est à mon sens, une incohérence flagrante à l'heure où les nations européennes ont pour mot d'ordre l'uniformisation. Moutonland caracole en tête du palmarès des plus gros taxeurs ! De plus, la T.V.A., impôt universel, touche toutes les couches sociales : pour le PDG, c'est rien, pour le RMIste, c'est trop. Voici qui ne va pas aller dans le sens des promesses électorales et qui par conséquent ne réparera pas cette fracture sociale que J.C. semblait tant vouloir réduire.

Bien sûr, à la hausse de la TVA se sont ajoutées les maintenant célèbres hausses du tabac et de l'essence. Moyen pratique pour ne pas augmenter l'indice de la hausse des prix à la consommation puisque ces denrées n'entrent pas dans le calcul de cet indice (qui décidément ne veut rien dire.)

Ensuite, M. Duppé, assisté des nouveaux ministres de la fonction publique et du budget annonce avec un grand sourire le gel des salaires des fonctionnaires en 96. Il veut également faire croire aux Moutonlandais que ceux-ci sont des privilégiés, et y parvient presque. Il y a même à cette époque, l'idée lancée puis démentie de faire passer à 40 ans le nombre d'années nécessaires pour obtenir la liquidation de la retraite du fonctionnaire.

Puis, arrive le cheval de bataille favori du gouvernement : résorber la dette de la sécurité sociale et Duppé, qui décidément travaille beaucoup, nous a préparé un plan dont lui seul a le secret ! Il le rend public, toujours aussi fier de lui et toujours aussi peu persuasif. La colère commence à gronder chez les syndicalistes. Alors, nous aurons donc une hausse du forfait hospitalier qui passera de 55 à 70 F au 1er janvier 96, ensuite le R.D.S ou C.S.G bis qui viendra grever nos salaires d'un pour cent supplémentaire, la maîtrise des dépenses, à savoir un contrôle systématique des médecins (pour voir s'ils ne prescrivent pas de médicaments pour s'amuser), un contrôle systématique des patients (pour voir s'ils ne vont pas à l'hôpital ou chez le médecin pour le plaisir) etc etc... Mais les fonctionnaires descendent dans la rue et paralysent Moutonland. Plus de train, plus de métro, plus de courrier... D'autres corporations de fonctionnaires menacent elles-aussi de se joindre au mouvement. Un bras de fer a lieu entre les syndicats qui souhaitent un retrait sans condition du plan Duppé et le gouvernement qui s'évertue à expliquer et à vouloir faire croire au bien fondé de cette réforme. Mais les Moutonlandais n'en veulent pas, ils expriment un ras le bol unanime qui dénonce et qui condamne cette habitude qu'ont pris les gouvernements de taxer de plus en plus.

Rien ne va plus à Moutonland en cette fin d'année 95, la paralysie exercée par les cheminots qui ne lâchent pas leurs piquets de grève commence à asphyxier l'économie du pays. On ne compte plus les centaines de kilomètres de bouchons à la périphérie de la capitale, les banlieusards mettent 4 ou 5 heures pour se rendre sur leur lieu de travail... En un mot, c'est le bordel.

Six mois après l'arrivée de Chorak au pouvoir, après quinze jours de grève, Duppé accepte enfin d'utiliser le terme de « négociations » sans pour autant en accepter le sens.

Pendant ce temps, ce cher J.C. effectue d'incessants voyages, selon la formule consacrée et qui ne choque plus personne : «Aux frais du contribuable.» Il n'apparaîtra pas une seule fois pendant ce conflit, trop occupé qu'il est de goûter aux spécialités culinaires des pays qui l'accueillent. Ce qui se passe à Moutonland ne lui coupe pas l'appétit. Il reste serein et il a raison : petit à petit, les mouvements sociaux vont s'asphyxier, le nombre de grévistes va diminuer, par besoin d'argent les hommes vont reprendre le travail et tout va redevenir comme avant. Qui peut lutter contre le pouvoir ?

Bien sûr, le 1er ministre a une cote effroyable dans les sondages, mais quelle importance maintenant qu'il est en place ? Les sondages d'opinion une fois que les gens sont au pouvoir, les hommes politiques s'en balancent. Personne ne va les licencier pour faute grave ! Ils y sont, ils y restent !
Un an après, en cette fin d'année 96, les transporteurs routiers essaient eux aussi de faire pression sur un gouvernement vraiment pas décidé à faire des concessions. Le gouvernement attendra sûrement comme l'année passée que les grévistes retournent gentiment au boulot pour pouvoir payer les traites de leur maison et pour pouvoir nourrir leur petite famille. Ils savent que sans le nerf de la guerre, l'argent, une barricade ne tient pas longtemps...

Je crois que les Moutonlandais sont définitivement impuissants face à ce pouvoir soi-disant démocratique.
Et oui, il semblerait bien qu'en ce doux dimanche de mai 95, la population toute entière d'un pays ait brisé un miroir sans se douter que cet acte allait leur promettre sept ans de malheur. Si les candidats aux élections sont autorisés à mentir délibérément pour s'attirer les faveurs du scrutin, s'ils ont le droit de faire nombre de promesses fantaisistes et alléchantes sans jamais les tenir et que personne ne s'insurge contre cet état de fait, que tout le monde trouve ça normal, alors c'est décidé, je n'irai plus jamais voter. Il y a tellement de choses beaucoup plus intéressantes à faire un dimanche après-midi... Le système démocratique, si parfait, permet à des gens de faire toutes sortes de promesses pendant leur campagne électorale, et surtout les autorise à ne pas les tenir une fois élus, sans aucune sanction, quelle qu’elle soit… Même pas la sanction des urnes puisque les Moutonlandais ont la mémoire courte. La démocratie c’est ça. Et puis, comme l’a dit un homme politique : « Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. » Ceci résume à peu près cela. Et bien moi, le jour où les promesses engageront également ceux qui les font, je me ferai une joie de mettre à nouveau mon bulletin dans l’urne. Mais pour l’instant je préfère m’écarter du troupeau. A bon entendeur…

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